Blogue de Pascal – Entraîneur de volleyball et Allié
Août 1994, Malibu, Californie, États-Unis
Seul, craintif, anxieux et inquiet, allongé sur mon lit d’hôpital à Malibu, j’attendais une chirurgie d’urgence suite à une grave blessure au dos. J’étais venu à Pepperdine University, sur l’invitation de l’entraîneur Marv Dunphy, pour partager mon expérience avec les jeunes participants à son prestigieux camp de développement. Je me souviens de cette nuit-là avec une clarté troublante, j’avais alors 32 ans. C’est à ce moment que je pris la décision de m’accepter et de faire face à mes démons. Avec courage, j’ai choisi d’embrasser ma différence malgré mes craintes et mes angoisses. Ce jour-là, je me suis juré de ne plus jamais cacher mon plus grand secret : mon homosexualité. « Plus jamais la peur ! Plus jamais la dissimulation, jamais, jamais de retour dans ce sombre placard ».
« Si je ne suis pas moi, qui le sera ? »
Cette citation de Henry David Thoreau, qui m’inspire depuis longtemps, met en lumière l’importance de l’authenticité et de l’individualité dans la construction de l’identité personnelle.
Ma différence, j’en avais déjà une bonne idée. Dès mon plus jeune âge, j’avais conscience de ma singularité. Immigrant dès l’âge de 8 ans, Français originaire des îles Saint-Pierre-et-Miquelon, bavard avec un accent coloré et déjà bien plus grand que les autres. Oui, dès ma jeunesse, j’avais exploré certaines de mes différences, celles que l’on remarque, celles que l’on entend. Mais jamais je n’avais accepté mon intérieur, mon identité, mon orientation sexuelle. Enfoui au plus profond d’un placard, tel un abîme dont on ignore l’issue. À maintes reprises, j’ai cherché des réponses, des modèles. Combien de nuits solitaires ai-je passées, cherchant dans mon entourage pour trouver la lumière ? C’est pourtant cette journée d’été de 1994 que Pascal, l’unique Pascal Clément, est né.
Dans les années 70-80, les allié·e·s et les modèles issu·e·s de la communauté LGBTQ+ étaient rares, leur expression et leur épanouissement étaient entravés. De plus, le monde du sport n’était pas propice à l’expression ou à la visibilité des personnes LGBTQ+. Je me souviens des caricatures gaies proposées à mes yeux d’adolescent sportif, notamment le personnage de Christian Lalancette, homosexuel du célèbre téléroman « Chez Denise ». Plus tard, dans les années 90, des figures comme le nageur canadien Mark Tewksbury et le plongeur américain Greg Louganis ont émergé, mais qui d’autre ?
Pour moi, Michel Tremblay, notre grand dramaturge, fut ma première source de libération. C’est à travers les personnages gais de ses œuvres théâtrales et romanesques que j’ai trouvé refuge, comprenant ainsi que je n’étais pas seul. En 1984, alors que j’étudiais le théâtre à l’Université Laval, j’avais choisi un extrait d’une de ses pièces, « Les anciennes odeurs », que j’avais présenté lors de mon audition à l’École nationale de théâtre du Canada. Je jouais alors aux côtés de mon ami de l’époque, André Robitaille, qui incarnait un jeune comédien gai face à son amant et ancien professeur de théâtre. N’étant pas encore sorti du placard, vous imaginez toute la partie d’émotion vécue tout au long de ce processus. Bonheur à travers le théâtre d’être celui que j’étais réellement et la peur d’être démasqué !!!
Plusieurs refus d’audition m’ont poussé à changer mon plan de carrière. Je suis retourné au monde du sport pour entreprendre mes études universitaires en éducation physique et poursuivre par la suite comme entraîneur et enseignant. Tout au long de mes 40 années comme coach sportif et éducateur, j’ai guidé des centaines de jeunes étudiants-athlètes en leur inculquant des valeurs essentielles qui continuent de les guider aujourd’hui dans leur vie personnelle et professionnelle : respect, intégrité, effort, esprit d’équipe, fierté, tolérance et acceptation des différences. À travers mes équipes sportives, j’ai vécu mes plus belles expériences humaines, où l’harmonie, l’inclusion et la performance ne peuvent s’exprimer pleinement que dans l’acceptation de l’autre.
Depuis lors, la cause LGBTQ+ et l’acceptation de la diversité en matière d’orientation sexuelle dans le sport me tiennent à cœur. Chaque individu doit être libre de se choisir, peu importe sa différence.
« La nature ne fait pas d’erreurs, mais nous offre de merveilleux cadeaux. »
Je vous invite tou·te·s à devenir des allié·e·s envers les personnes LGBTQ+, et tout particulièrement envers les jeunes sportif·ve·s. Être un·e bon·ne allié·e signifie s’engager dans une éducation continue sur les défis auxquels ils·elles sont confronté·e·s, écouter activement leurs expériences sans jugement, offrir un soutien inconditionnel en toutes circonstances, remettre en question les comportements discriminatoires et participer activement à des actions de plaidoyer et de sensibilisation, tout en respectant leur autonomie.